Un jour, Natacha, la mère d’Abigaelle lui a donné un collier, une petite clé, en lui expliquant « C’est la clé de ton cœur. Le médecin s’en servira pour l’ouvrir et le réparer. »
Comment expliquer à sa fille, née avec une fibrose hépatique, une tétralogie de Fallot, en plus d’une insuffisance surrénale, qui a subi sa première opération à cœur ouvert un mois après sa naissance, tout ce qu’elle doit subir comme interventions pour rester en vie? Les images aident beaucoup.
Dans toutes les histoires d’enfants aux prises avec de grands défis, se cachent celles de parents, forts, qui les aident à traverser ces épreuves et à faire face aux défis.



Ça demande bien sûr quelques sacrifices, par amour. Natacha a dû mettre de côté sa carrière et ses loisirs. Accompagner sa fille était tout naturel. Mais bien sûr, parfois, il y a des moments plus difficiles, des moments où elle ne se souvient plus trop qui elle était avant que son plus grand désir soit celui d’offrir à sa fille la vie la plus normale possible. « Je n’ai jamais voulu pleurer devant ma fille. Elle est tellement forte. Je veux l’être aussi. Pour elle. »
Abigaelle répète souvent « On fait ce qu’on peut. » Elle le dit pour le personnel qui la soigne, pour ses parents, et pour elle-même. Car pour elle, malgré sa fougue, tout est un défi. Son cœur ne la suit pas. Il se fatigue plus vite qu’elle.
Elle voudrait chanter. Mais elle fait ce qu’elle peut. Et quand elle peut, c’est «Du bonheur dans les étoiles» et «Rester fort» de Marc Dupré qui lui viennent au bout des lèvres. Et quand on s’attarde aux paroles, on comprend ce qu’Abigaelle tente de nous transmettre. « ll faut bien, dans ce monde, tenir à quelque chose de plus beau, quelque chose pour nos rêves brisés, quelque chose pour nos cœurs épuisés. » Mais elle fait ce qu’elle peut, malgré cette volonté de rester forte.
Au fil du temps et des opérations, la cicatrice d’Abigaelle a commencé à prendre la forme d’un arbre, dont les racines resteraient accrochées bien au sol et dont les branches iraient toucher les étoiles. C’est avec sa maman qu’elle a trouvé cette métaphore. Et pour les deux complices, la cicatrice est devenue l’arbre de la vie. Celui qui résiste à toutes les tempêtes.
Il n’existe pas de définition universelle pour le mot arbre, tant ce concept regroupe une vaste variétés d’espèces. Mais des études scientifiques ont démontré que dans la nature, les arbres s’entraident. Quand une espèce est malade, ses congénères vont l’aider à se rétablir jusqu’au bout, en lui donnant de quoi se nourrir par les racines.
C’est le rôle que Natacha s’est donné : s’oublier, pour que sa fille puisse s’enraciner et que ses branches puissent pousser vers la lumière.
Lorsqu’on lui parle de tout ce qu’elle fait pour Abigaelle, Natacha nous lance un regard remplit d’humilité. « De plus en plus, j’ai de la difficulté à ne pas laisser aller mes émotions. » Et Abigaelle la rassure de sa fameuse phrase : «Maman, on fait ce qu’on peut…»
Abigaelle fleurira au printemps et nous laissera assurément du bonheur dans les étoiles et si elle chante, elle veut sûrement que sa maman entende ces quelques mots de sa chanson préférée : « Je ne voudrais pas te ralentir, ni t’empêcher d’être toi. »
*Les propos tenus dans cet article n’engagent que la personne signataire et ne doivent pas être considérés comme étant ceux de la Fondation CHU Sainte-Justine.